Rémunération ou non, la responsabilité du dirigeant pour comblement de passif s’apprécie de la même manière
Publié le :
09/02/2021
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En droit commun, la règle veut qu’en matière de recherche de responsabilité cette dernière soit appliquée de manière moins rigoureuse lorsque la personne mise en cause exerce ses fonctions à titre gratuit.
Cette atténuation est prévue à l’article 1992 alinéa premier du Code civil « Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu’à celui qui reçoit un salaire », mais n’a pas vocation à être absolue, comme l’a récemment rappelé la Cour de cassation.
À titre préliminaire, l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif est une action menée par le liquidateur judiciaire lorsqu’il estime que les dirigeants de la société sont responsables de la liquidation, du fait de leur mauvaise gestion, ou quand cette dernière a eu pour but d’aggraver la situation financière.
Si la responsabilité est reconnue, le dirigeant est condamné à combler le passif de la société liquidée, on parle également « d’action en comblement de passif ».
Dans l’affaire en question, une société a été placée en liquidation et le liquidateur judiciaire a engagé la responsabilité du dirigeant pour insuffisance d’actif. Ce dernier s’est vu condamné, tant en première instance qu’en appel, à combler le passif de la société liquidée à hauteur de 500 000 euros.
Le dirigeant condamné a alors formé un pourvoi en cassation sur le fondement de l’article 1992 du Code civil, estimant que compte tenu du fait qu’il n’était pas rémunéré pour ses fonctions de dirigeant il ne pouvait pas, ou de manière moindre, être condamné à combler le passif.
En effet, ce dernier était dirigeant bénévole de la société en question, les locaux de cette dernière étaient simplement loués par une société civile immobilière dans laquelle il détenait des parts.
Cependant, la chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi ainsi que l’application du principe d’atténuation de responsabilité, en faisant valoir la règle spécifique posée par les dispositions commerciales : « Lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion... » (article L 651-2 du Code de commerce).
Ici la Cour de cassation fait application de la maxime selon laquelle les lois spéciales dérogent aux lois générales.
Sans méconnaître le principe général, la règle selon laquelle la responsabilité générale du mandataire est appliquée moins rigoureusement lorsque le mandat est gratuit ne concerne pas la situation du dirigeant d’une personne morale en liquidation judiciaire poursuivi en paiement de l’insuffisance d’actif. Cette situation est en effet régie par une disposition spéciale posée par le Code du commerce.
La responsabilité pour comblement de passif du dirigeant de la société placée en liquidation judiciaire s’apprécie de la même manière, concernant le fait qu’il soit rémunéré ou non.
Référence de l’arrêt : Cass. com 09/12/2020 n° 18-24.730
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