Établissements distincts : le juge tient compte de l'autonomie de gestion à la date où il statue
Publié le :
30/07/2020
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Lorsque le tribunal judiciaire est saisi d'une contestation de la décision du Direccte sur la détermination des établissements distincts pour les élections professionnelles, le juge tient compte de l'ensemble des circonstances de fait à la date où il statue, affirme la Cour de cassation le 8 juillet 2020.
La détermination des établissements distincts est souvent le nerf de la guerre dans le cadre de la mise en place de l'instance regroupée qu'est le CSE. En l'absence d'accord, c'est l'employeur qui fixe le nombre et le périmètres établissements. Mais un critère est alors impératif : l'autonomie de gestion du responsable de l’établissement, notamment en matière de gestion du personnel. Cette décision peut être contestée devant le Direccte, laquelle décision peut également être portée devant le tribunal judiciaire.
Lorsque le tribunal judiciaire accueille partiellement ou totalement cette contestation, il doit statuer à nouveau, par une décision se substituant à celle de l'autorité administrative (arrêt du 19 décembre 2018). C'est sur ce point que la Cour de cassation apporte une précision importante dans son arrêt du 8 juillet 2020.
Nouvelles délégations de pouvoir diminuant les pouvoirs des chefs d'établissement
Dans cette affaire, à la suite de l'échec des négociations, l'employeur prend une décision unilatérale le 7 septembre 2018 fixant le nombre des établissements distincts à 20. Les organisations syndicales saisissent le Direccte qui rejette le recours formé contre cette décision unilatérale. Le tribunal judiciaire se prononce à son tour et fixe, dans des termes identiques à la décision unilatérale de l'employeur le nombre et le périmètre des établissements distincts de l'entreprise pour les élections professionnelles. Ainsi, sur 20 établissements distincts, 16 sont fixés pour le réseau commercial de magasins correspondants au périmètre de chacune des directions régionales de la direction de l’exploitation.
Mais les syndicats n'abandonnent pas et l'affaire est portée devant la Cour de cassation. Pour ces derniers, la détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts de l’entreprise ne peut pas être fixée par l’employeur au regard d’une organisation et d’une répartition des compétences qui n’existaient pas au jour de sa décision. Ainsi, la réduction importante des délégations de pouvoir des chefs d'établissements (directeurs de magasin) en date du 1er octobre 2018, ne doit pas être prise en compte. D'autant, ajoutent les syndicats que l'accord collectif n'a pas pu être loyalement négocié, les partenaires sociaux s'étant basé sur une organisation de l'entreprise dans laquelle les directeurs de magasin disposaient de larges délégations de pouvoir en matière de gestion du personnel (embauches, sanctions y compris licenciement dans le cadre du magasin).
Prise en compte de la délégation de pouvoir au moment du jugement
Mais la Cour de cassation n'est pas d'accord.Elle explique "qu’il résulte de l’article L. 2313-5 du code du travail que, lorsqu’il est saisi de contestations de la décision de l’autorité administrative quant à la fixation du nombre et du périmètre des établissements distincts, il appartient au juge de se prononcer sur la légalité de cette décision au regard de l’ensemble des circonstances de fait dont il est justifié à la date de la décision administrative". En cas d’annulation de la décision du Direccte, le juge doit statuer à nouveau, en fixant ce nombre et ce périmètre d’après l’ensemble des circonstances de fait à la date où le juge statue.
Examen des délégations de pouvoir
Ainsi, ce sont les délégations de pouvoir du 1er octobre qui sont prises en compte pour déterminer les établissements distincts.Et la Cour de cassation d'examiner ces circonstances de fait et d'en déduire que "les délégations de pouvoir établies le 1er octobre 2018 pour les directeurs de magasin mentionnent uniquement l’application de la réglementation en matière de gestion individuelle du personnel, que ne sont donc plus déléguées aux directeurs de magasin les compétences relatives aux procédures disciplinaires, y compris les licenciements, et à la procédure d’embauche, que le processus de recrutement en place depuis le mois d’avril 2016 est tel que ces directeurs ne jouissent plus que d’un pouvoir de proposition d’embauche, la décision relevant des directions régionales et nationales, que, depuis le mois de juillet 2018, ces directeurs sont privés de tout pouvoir de prononcer des sanctions autres que des rappels à l’ordre et des avertissements, les sanctions les plus graves ressortant, in fine, au niveau supérieur, en sorte que, le recrutement et les procédures disciplinaires relevant de la compétence des services des ressources humaines régionaux ou nationaux, il n’existe pas à l’échelon des magasins une autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel pour retenir que chaque magasin constitue un établissement distinct."
En conséquence, la Cour de cassation rejette le pourvoi des syndicats et valide les
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