Reconnaissance du Bore-out comme forme de harcèlement moral

Reconnaissance du Bore-out comme forme de harcèlement moral

Publié le : 03/08/2020 03 août août 08 2020


Le bore-out, inverse du burn-out, est une situation de sous-charge de travail ayant pour conséquence de causer chez le salarié un épuisement provoqué par l’ennui, telle que des répercutions en termes de dégradation des conditions de travail et sur l’état de santé, peuvent être constatées. 

Admis jusqu’alors comme maladie, les juges ont semble-t ’il décidé de reconnaitre le bore-out comme forme de harcèlement moral au travail. 

Dans une récente décision, un responsable services généraux se retrouve en arrêt maladie prolongé au cours duquel l’entreprise qui l’emploi décide de le licencier, pour absence prolongée désorganisant l’entreprise et nécessitant un remplacement définitif. 

Contestant son licenciement, le salarié évoque avoir été victime d’un harcèlement moral de la part de la direction, pris en la forme d’une mise à l’écart caractérisée par le maintien pendant plusieurs années dans une relation de travail, sans se voir confier de réelles tâches en lien avec ses qualifications et ses fonctions contractuelles. 
Le salarié mentionne également avoir exécuté des tâches de subalterne de type « homme à tout faire » et concierge privé pour les dirigeants. 

L’interdiction de faits de harcèlement moral est posée à l’article L 1152-1 du Code du travail : « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ». 

Lors d’un litige la charge de la preuve est partagée, le salarié doit établir les faits permettant de présumer l’existence du harcèlement, à charge à l’employeur de prouver que les agissements évoqués n’en sont pas constitutifs, et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs et étrangers à tout harcèlement (article L 1154-1 du Code du travail). 

Ici le salarié fourni plusieurs attestations d’autres salariés qui mettent en évidence sa mise à l’écart, notamment par ses demandes répétées auprès des autres collaborateurs de lui confier du travail pour qu’il « se sente utile », tandis que d’autres attestent qu’il était empêché d’avoir une vision de la gestion des dépenses liées aux événements et voyages. Un ancien salarié atteste d’ailleurs avoir pu observer sur leurs deux dernières années de collaboration, une dépression de la part du salarié au fur et à mesure de sa mise au placard, ainsi que du retrait de ses fonctions de coordinateur événements et voyages suite à une tentative de dénonciation d’abus de biens sociaux. 
Ajoutées à ces attestations, des pièces prouvent l’exécution de taches de conciergerie de type courses et dépannages (configurations ou réparations d’appareils électroniques appartenant à la direction). 
A la proposition du salarié de faire évoluer son poste vers des fonctions RSE (responsabilité sociétale des entreprises), la réponse de la société a été que : ça n’aurait pas pour effet de modifier sa charge de travail, lui étant conseillé de mettre à profit le temps dont il dispose pour refaire son CV. 

Sur le plan médical, des certificats médicaux font mention de crises d’épilepsies et d’une dépression pour laquelle le salarié a suivi une psychanalyse, appuyés par des attestations de proches certifiant qu’il avait évoqué des idées suicidaires. 

L’ensemble de ces éléments permettant d’établir la matérialité d’une situation de harcèlement moral provoqué par un bore-out, et l’employeur ne parvenant pas à justifier sa décision sur des éléments étrangers suffisants, la Cour d’appel de Paris prononce la nullité du licenciement, condamnant l’employeur au versement de dommages et intérêts. 

S’agissant d’une décision susceptible de recours, il apparait intéressant de connaitre la position de la Cour de cassation quant à la confirmation ou non d’une telle reconnaissance. 

Référence de l’arrêt : CA Paris 2 juin 2020 n°18/05421
 

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